Vers une eau pure: 10 contre-vérités sur le communiqué d’Eau du Sud Francilien

Dernière mise à jour :  mardi 9 mai 2023
L'usine de Méry-sur-Oise (95) équipée de membranes depuis 1999.

Dans un document d’une quinzaine de pages, Eau du Sud Francilien - à travers son président Michel Bisson - s’oppose au projet du SEDIF pour la préservation et l’amélioration de la santé de ses usagers. Ce document remet en cause le projet à travers la technologie employée, l’impact environnemental ou encore le montant.

Bien que le débat et les avis constructifs soient une nécessité, nous, élus du Bureau du SEDIF, représentant les intérêts de plus de 4 millions d’usagers, souhaitons répondre aux principales contre-vérités mises en avant dans ce document.

« Pour limiter le montant de l’investissement, le SEDIF a retenu la solution consistant à by-passer de l’étape membranaire 30 % des eaux traitées par les filières actuelles. Leur mélange avec le permeat assure l’apport en minéraux mais maintient dans l’eau traitée d’éventuels éléments que la technologie OIBP aurait pu éliminer. »

 

➡️ C’est faux. Le projet du SEDIF ne consiste pas à mettre en place une technique basée uniquement sur des membranes d’Osmose Inverse Basse Pression (OIBP) qui nécessiterait effectivement un mélange. Le projet prévoit une combinaison de membranes (OIBP / nanofiltration) qui permettra d’obtenir le meilleur abattement des micropolluants tout en conservant une bonne minéralité pour une distribution en toute sécurité et en tout temps. 100% de l’eau distribuée sera traitée par des membranes et, comme c’est aujourd’hui déjà le cas sur l’usine de Méry-sur-Oise, aucune reminéralisation ne sera nécessaire. La qualité de cette eau permettra aussi d’envisager la distribution d’une eau sans chlore. Cela est expliqué en détail dans les documents d’information du SEDIF disponibles sur le site Internet du débat public.

 

« Une technologie qui nécessite le prélèvement de 15 à 20% d’eau supplémentaire dans les milieux naturels pour produire la même quantité que les filières classiques. »

 

➡️ C’est partiellement faux. Un prélèvement supplémentaire de 15 % est effectivement nécessaire mais le volume est restitué dans le milieu une centaine de mètres en aval du point de prélèvement. L’impact quantitatif sur la ressource sera donc nul. Cela est expliqué en détail dans les documents d’information du SEDIF disponibles sur le site Internet du débat public.

 

« Concernant l’impact environnemental, Eau du Sud Francilien s’inquiète « d’une augmentation de 20% de la concentration des éléments indésirables tels que les nitrates ou les résidus de pesticides » et « du traitement- non prévu à ce jour dans le projet- (…) des adjuvants associés à la filtration »

 

➡️ C’est faux. L’augmentation de 20% de la concentration indiquée est non fondée. La concentration en micropolluants en aval de la filière membranaire sera sensiblement la même qu’en amont. Au niveau local (c’est-à-dire au point de rejet), le SEDIF a effectué des modélisations du panache qui montrent que le concentrât n’a pas d’impact sur le milieu naturel grâce à un effet de dilution rapide des cours d’eau (le concentrât ne représente, au maximum, que 2% du débit minimal exceptionnel de la rivière). Par ailleurs, ces rejets feront l’objet d’un arrêté de rejet validé par les services de l’État en charge de la préservation de la ressource, comme c’est déjà le cas à l’usine de Méry.

 

Concernant les adjuvants nécessaires au bon fonctionnement des installations, ils seront traités dans une filière spécifique qui permettra d’éliminer le phosphore qui les compose, principal élément pouvant poser problème d’un point de vue environnemental. Le SEDIF est extrêmement attentif à l’impact de ses usines sur l’environnement.

 

Eau du Sud Francilien cherche à agiter les peurs sur l’impact environnemental du projet d’une part, et sur le risque encouru par les usines de production d’eau potable situées en aval d’autre part alors qu’aucune modification du milieu ne sera perceptible.

Le site du débat public

« Une technologie qui nécessite trois fois plus d’énergie électrique pour produire la même quantité d’eau »

 

➡️ C’est faux. L’augmentation de consommation envisagée ne sera pas de 300 % comme affirmé mais de + 55% par rapport à la situation actuelle. De plus, cette augmentation de consommation énergétique sera largement compensée par les économies d’énergie réalisées par les 4 millions d’usagers du SEDIF. Une eau douce permet en effet des gains d’énergie dans l’ensemble des systèmes de chauffe (chauffe-eau, électroménager divers, etc.).

 

Cela est expliqué en détail dans les documents d’information du SEDIF disponibles sur le site Internet du débat public.

 

« L’existence de deux qualités d’eau (l’eau respectant la directive européenne d’une part et l’eau osmosée d’autre part) compromet les futurs échanges d’eau et contraint les territoires périphériques à envisager des investissements similaires à ceux du SEDIF, soit des dépenses considérables et injustifiées. »

 

➡️ C’est faux. L’existence de deux qualités d’eau différentes ne représente pas une barrière : les caractéristiques des eaux produites sont déjà différentes aujourd’hui entre les territoires ce qui n’empêche pas les échanges nécessaires entre eux. Rappelons que c’est déjà le cas de l’eau nanofiltrée produite par l’usine de Méry-sur-Oise, qui a une qualité différente de celles des syndicats voisins, et que cela n’empêche pas le SEDIF de faire des échanges d’eau avec eux.

 

Il est intéressant de constater qu’Eau du Sud Francilien cherche à opposer ici une eau respectant la directive européenne, ce qui n’est en fait déjà plus le cas en ce qui concerne le Chlorotalonil, avec l’eau qui sera produite demain par le SEDIF qui en sera dépourvu.

 

Rappelons enfin que le juge administratif a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la responsabilité pour faute d’un syndicat de distribution d’eau potable qui avait laissé perdurer pendant plusieurs années des taux de concentration d’une substance pesticide supérieurs aux exigences légales, sans avoir mis en œuvre tous les moyens à sa disposition pour les réduire.

 

« … le traitement dans les usines actuelles peut être renforcé. C’est le cas par exemple du projet d’Eau de Paris dans sa nouvelle usine Orly 2 avec le recours à la technologie Carboplus de filtration sur charbon actif à renouvellement continu, sans « la fuite en avant technologique » (propos de Dan Lert, Président d’Eau de Paris) que représente l’OIBP. Plutôt que d’anticiper un tout curatif laissant le champ libre aux pratiques indésirables dans les zones d’alimentation des captages, Eau de Paris préfère investir pour le long terme dans la prévention par des actions en amont avec les agriculteurs. »

 

➡️ L’installation de la technologie Carboplus sur l’usine d’Orly 2, pensée il y a dix ans par Eau de Paris, a été construite par un opérateur privé, et conçue pour arrêter les micropolluants via une technique de filtration sur charbon actif. Preuve que la problématique du traitement des micropolluants est bien au cœur des réflexions de tous les grands acteurs de l’eau. Il apparait cependant aujourd’hui que cette technologie curative n’a que peu d’impact sur certains d’entre eux, comme le Chlorotalonil qui est justement au cœur de l’actualité suite au rapport de l’Anses.

Concernant les actions de préservation de la ressource, il faut rappeler qu’Eau de Paris se concentre uniquement sur ses ressources souterraines qui représentent 50% de sa production d’eau. Le SEDIF, quant à lui n’a que 3 % de ressources souterraines ce qui limite grandement sa capacité à avoir un réél impact grâce à des actions de prévention.

 

« Eau du Sud Francilien dénonce « la course à la constitution de vitrines technologiques des deux groupes français leader sur le marché mondial. C’est aussi, dans cette compétition, une réponse à la généralisation de la décarbonatation installée par Suez en 2017 et 2018 dans les usines franciliennes de l’ouest (Aubergenville, Le Pecq, Mont Valérien, Louveciennes). »

 

➡️ Il faut sans doute rappeler ici que quel que soit le type de service public d’eau (collectivité locale ou syndicat) ou le mode de gestion retenu (régie, délégation de service public/concession ou mixte), la construction d’une installation de production d’eau potable est toujours confiée à l’un des leaders français du domaine. Il n’y a pas à ce jour d’alternative. En revanche, il semble indispensable que le service de l’eau soit propriétaire de ses ouvrages de traitement pour se positionner en tant que maitre d’ouvrage ; ce qui est le cas de l’ensemble du patrimoine du SEDIF mais pas de celui d’Eau du Sud Francilien qui achète depuis cinquante ans de l’eau en gros a des opérateurs privés qui sont propriétaires de leurs usines de production d’eau potable.

 

« L’eau pure, sans calcaire, sans chlore : le mythe de la technologie purificatrice est un renoncement à la protection des ressources en eau. Le calcaire est un complément alimentaire nécessaire, le chlore est une obligation réglementaire. »

 

➡️ C’est faux. Il n’y a pas de renoncement à la protection de la ressource. C’est un combat à mener sur le long terme. Il faut ici noter que les bassins versant dont dépendent 97% des ressources du SEDIF s’étendent sur plus de 12% du territoire français, faisant de cette problématique un enjeu national. Il faut à ce niveau faire un constat pragmatique : la France est le premier consommateur de pesticide d’Europe et le troisième au monde. 100 000 tonnes de substances actives sont utilisés chaque année sans une véritable tendance à la diminution. Ces polluants vont rester des dizaines d’années dans notre environnement. On ne peut malheureusement pas attendre un changement rapide et global des comportements amenant une amélioration notable des choses. On parle ici de santé publique et l’inaction n’est pas dans l’ADN du SEDIF depuis sa création il y a 100 ans, en 1923.

 

Concernant le calcaire, l’eau produite sera douce avec une qualité et une composition qui sera entre l’eau d’Evian et de Volvic. Le calcaire sera donc évidemment présent et dans une concentration largement suffisante.

 

Enfin concernant le chlore, il n’y a aucune obligation réglementaire nationale. En France, l’usage est à quelques exceptions comme Grenoble ou Mulhouse, de distribuer de l’eau chlorée, bien que cela ne soit imposé par aucune réglementation. La mise en place de l’eau sans chlore sur le périmètre du SEDIF sera le résultat d’une démarche longue de test et de réflexion en partenariat avec les services de l’État, dont l’avis sera déterminant.

Débat public sur l'eau potable en Ile-de-France : découvrez en 4 minutes le projet du SEDIF

 

« La technologie reporterait la responsabilité sur les services d’eaux de régler la problématique des polluants divers, et donc son coût sur les usagers, au lieu de faire contribuer les responsables de ces pollutions, et d’y mettre un terme. »

 

➡️ Au contraire, gérer la problématique des polluants est bien de la responsabilité des services de l’eau et cela depuis toujours ! Il est inquiétant de constater que ce n’est pas l’avis de tous les producteurs d’eau dont certains cherchent apparemment à se défausser de leur responsabilité. La réglementation européenne et nationale fixe désormais des objectifs de plus en plus stricts pour retirer de l’eau distribuée au robinet, les polluants qui se trouvent dans les eaux brutes. Il appartient désormais aux distributeurs d’eau potable de mettre en œuvre des mesures adaptées, à un coût maîtrisé. C’est bien l’objet du projet du SEDIF.

 

« L’impact tarifaire d’un tel investissement complémentaire et de son exploitation est de l’ordre de 0,30 € HT/m3, soit l’ordre de grandeur d’un doublement du coût de production de l’eau potable. »

 

➡️ L’impact tarifaire du projet est évalué entre 0,30 €/m3 et 0,40 €/m3. Il est à comparer avec le coût payé par l’usager qui est aujourd’hui de 4,81 €/m3. Il s’agit donc d’une augmentation de 6,2% du coût du m3 ce qui représente pour un foyer moyen (2,3 personnes) 3 à 4 euros par mois supplémentaires sans compter les gains apportés par l’adoucissement de l’eau qui permettront aux usagers de faire des économies : moins de produits ménagers, allongement de la durée de vie et baisse des consommations énergétique des appareils chauffant l’eau. Nier aujourd’hui l’impact du calcaire sur le budget des ménages montre une mauvaise connaissance du sujet.

Cela est expliqué en détail dans les documents d’information du SEDIF disponibles sur le site Internet du débat public.

 

 

Au travers de son document, Eau du Sud Francilien tente de minimiser sa responsabilité de producteur d’eau face aux grands enjeux sanitaires de demain et semble inquiet de l’ambitieux projet du SEDIF : en effet comment justifier demain à la population que rien a été fait pour garantir une eau potable la plus saine possible ?

 

Le débat public intitulé « L’eau potable en Ile-de-France » est l’occasion pour tous les grands services de l’eau francilien de discuter de ces grands enjeux avec objectivité et pragmatisme.